• LES SOUVENIRS DU TEMPS PERDU.

     

    IL Y A DES SOUVENIRS PARFOIS QUI SONT TAPIS DANS UN COIN DE MÉMOIRE.

    ET QUI ATTENDENT, TOUJOURS, L’INSTANT DANS UNE VIE. CETTE HEURE FAVORABLE,

    QUI POURRA LEUR PERMETTRE DE REVIVRE UN PEU QUELQUES LUEURS  D’ESPOIR…

    J’EN AI ÉCRIS CERTAINS QUI M’ONT RENDU  HEUREUX.

    DES VIEUX QUI ONT TRENTE ANS, RECOUVERTS DE POUSSIÈRE ET QU’IL FALLAIT CHERCHER ENFOUIS SOUS DES PASSIONS.

    QUI ÉTAIENT MORTS DE PEUR OU PEUT-ÊTRE ÉCRASÉS LORS D’UNE GUERRE INTERNE DANS  CE COIN DE CERVEAU EN CONFLIT QUELQUEFOIS.

    IL FAUT FAIRE ATTENTION, POUR UNE CRISE DE FOU OU UNE CRISE DE FOI LES NEURONES S’ENTRETUENT.

     

    IL Y A DES SOUVENIRS PARFOIS QU’IL VAUDRAIT MIEUX EMPÊCHER DE SORTIR.

    LES SOUVENIRS TU SAIS ; ILS NE SONT JAMAIS VIEUX, ET IL FAUT LES BRULER

    POUR NE PLUS EN SOUFFRIR, POUR NE PAS EN PLEURER, POUR NE PAS EN MOURIR.

    TU VOIS IL VAUDRAIT MIEUX LES LAISSER ENFOUIS SOUS LEURS TOILES D’ARAIGNÉES.

     

    POURQUOI SAIT-ON TOUJOURS ALORS QU’IL EST TROP TARD QUE LE TEMPS EST FUGACE

    ET QUE LE DÉSESPOIR NE FRAPPE PAS PAR HASARD MAIS SOUVENT NOS ERREURS.

    OU BIEN NOS NÉGLIGENCES QUAND ON CROIT QUE DEMAIN SUFFIRA A LA PLACE

    DE CE TEMPS QUE L’ON A BAFOUE AVEC DÉDAIN

    ET PERDU ; C’EST CERTAIN.

     

    ET JE VOUDRAIS POUVOIR CONVAINCRE MES AMOURS, MES AMIS, MES ALLIES,

    CEUX QUI DE MON PASSE ME REVIENNENT TOUJOURS. CEUX QUE J’AI PAS CONNUS

    MAIS QUI ME CROISERONT PAR HASARD DANS CES RUES  OU NOUS AVONS OUBLIE

    UN GESTE DE LA MAIN, UN MOT DE BIENVENUE SANS UN SOUS-ENTENDU.

    JE CROIS QU’IL MANQUE ENCORE DANS LA TÊTE DES GENS DES TONNES DE TOLÉRANCE

    ET LE RENONCEMENT DE CES BESOINS URGENTS QUI LES RENDENT SI EXTRÊMES

    ET PUIS QUI LES REMPLISSENT D’INSONDABLES REMORDS POURVOYEURS DE SOUFFRANCES,

    QUI LES DÉCHIRENT PARFOIS COMME UN CHIEN FOU QUI MORD LA VIANDE JUSQU’À L’OS.

    NEURONES ÉLECTRONIQUES, ORDINATEURS FUTURS APPRENDREZ-VOUS A L’HOMME

    A AIMER SON PRÉSENT. REJETANT CES TORTURES QU’IL S’INFLIGE SOUVENT

    PAR BÊTISE, PAR FIERTÉ, POUR L’HONNEUR QUELQUEFOIS.

    OU BIEN SERA-T-IL COMME

    SES ANCÊTRES ENFERME DANS UN MANQUE DE FOI TOTAL EN L’AVENIR.

    JE RESTERAI PENSIF JUSQU’AUX DERNIERS INSTANTS

    LE REGARD ENFUME PERDU DANS QUELQUE BRUME FLOTTANT SUR L’OCÉAN

    DE CES ANNÉES PERDUES QUI NE VALENT PLUS RIEN PUISQU’ELLES SONT VÉCUES

    ET MORTES ET ENFERMÉES DANS CETTE BOITE IDIOTE QUI NE SERT DÉJÀ PLUS

    QU’A REMUER LE PASSE.

     

    VEVEY. LE 26 / 03 / 1997.

     


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  •  Je voudrais pas crever

     

    Je voudrais pas crever comme disait Boris Vian,

    Sans connaitre ces îles perçant les océans,

    Prendre un peu de repos.

    Je voudrais pas crever sans aller regarder

    Vraiment au fond des yeux ces peuples lézardés,

    Éparpillés, perdus…

    Qui n’ont aucune idée du

    mépris qu’on leur donne,

    Occidentaux gavés tels des

    porcs qui gloutonnent.

    Je voudrais pas crever sans

    voir des éléphants,

    Eux qui n’ont pas encore pillé

    leur continent…

    Hypothéqué demain…

    Sans toucher des baleines,

    frémir juste en croisant        

    Leur regard insondable,

    apaisant,

    Étonnamment confiant. 

    J’aurais voulu connaître dodo

    et thylacine,

    Mais je ne pourrai pas ! Alors

    je les dessine.

    Je voudrais pas crever sans

    voir en haut des cimes,

    Un aigle, un gypaète, avant

    qu’on les décime

    Un edelweiss aussi.

    Je voudrais bien savoir si elle

    est vraiment bleue,

    Cette planète Terre, faire vite

    si c’est possible,

    Avant qu’elle ne soit jaune…

    Jaune sable désert, jaune fleuves boueux,

    Et soufre des volcans, furoncles nauséeux…

    Je voudrais pas crever sans savoir que j’ai tort

    De penser que les hommes qui se croient tellement forts

    Ont tort d’être vivants.

    Je voudrais pas crever sans savoir que j’ai tort

    De ne pas les aimer… sans savoir que j’ai tort

    De croire qu’ils sont mauvais.

    Je voudrais ne pas croire qu’une planète sans eux

    Serait beaucoup plus saine… sûrement vraiment bleue.

     


     

     

     

     

     

    Je t’aime.

     

     

    Lorsque tu n’es pas là je recherche des traces.

      Ma mémoire imagine le son de tes pas.

    Le parfum qui te suit quand tu changes de place.

    Et l'ombre de ton corps dans la courbe des draps.

     

    Ce lambeau de phrase que je sais terminer.

    Un regard que tu as au moment de partir.

    Cet au-revoir furtif qui pourrait me miner

    Si tu n’avais souri juste avant de sortir.

     

    Je regarde aussi tes vêtements épars,

    Ils peignent ton présent sur le bord de ce lit.

    Seuls témoins d’un amour qui vient et puis qui part

    Imprégnant sa place pour empêcher l’oubli.

     

    Parfois une question :  est-il une maison

    Où je saurais trouver ton empreinte d'amour.

    Dans ces moments je doute peut-être avec raison :

    Survient la jalousie, ce poison de toujours.

     

    Notre vie se poursuit avec ces alternances

    De bonheur, de soucis, de souffrances parfois,

    Mais au fond entre nous, il nous reste la chance

    De cet amour qui nous réunit chaque fois.

     

     

     


     

     

     


                Je te vois

    Je te vois.

    Devant ce quai de gare,  mon amour, je te vois.

    Si je ferme les yeux j’ai encore ton regard

    Cloué au fond du mien et puis j’entends ta voix

    Qui me dit au-revoir, et puis… il est trop tard.

    Je m’en vais.

    Avec le souvenir de tes yeux inquiétés

    Dans un coin de mémoire où je sais le trouver,

    Et puis ces derniers mots, quelques banalités,

    Dernière phrase de trottoir qui n’a rien à prouver.

    Je t’attends.

    Je t’attends dans ma vie comme on attend une île.

    Quand mes voiles déchirées de triste naufragé

    Atteindront ce rivage, le premier si facile

    Auquel j’accèderai après tant de dangers.

    Je te vois.

    Je regarde mon absence dans les murs où tu vis,

    En attendant qu’un jour je touche à ces objets,

    En attendant qu’un jour je retouche à ta vie,

    En attendant qu’un jour se rejoignent nos trajets.

     

     


     

     

    Les vieux mariés.

     

    Ils sont là :  deux têtes avec les mêmes souvenirs,

    enfin, pas tout à fait.

    quelques-uns leurs sont bien personnels

    mais c’est sans importance.

    Ils s'observent toujours ; leurs yeux semblent sourire

    dans ces toiles d’araignées

    que leur temps a tissé pour un air solennel

    avec tant de patience.

    Ca fera soixante ans au printemps qui arrive

    qu’ils se sont rencontrés.

    Ils ont les cicatrices d’un siècle d’existence

    à quelques années près,

    avec la certitude de leur prochaine dérive

    qui s’inscrit sur leurs traits

    et qu’ils attendent... comme une fatalité.

     

    A l’âge qu’ils ont atteint, leur dernière inquiétude

    dont ils ne parlent pas

    c’est de ne pas pouvoir s’en aller tous les deux,

    la main dans la main.

    Après tant de vécu, pour eux, la solitude

    sera pire qu’un trépas,

    et ils savent très bien quoi qu'il arrive

    qu'un souffrira demain.

    De toutes les épreuves d’une vie entière

    un connaitra la pire.

    Mais ils ne sauront pas jusqu’au dernier instant

    celui qui la vivra,

    comme si le destin réservait la dernière

    selon son bon plaisir

    à la triste victime qu’en vrai maître du temps

    lui-même choisira.

     

     


     

     

    Destination

     

    Le temps est une chaine qui nous entrainera vers la fosse commune où nous irons nourrir

    comme l’ont fait nos ancêtres depuis la nuit des rats cette entraille impatiente de nous voir revenir.

    Je la vois accrochée à la patte des gens comme une chaine d’ancre les contraignant au sol

    Misérables rampants qui trainent en tous sens avant d’aller remplir les caves du sous sol

    La terre nous a bien eus, cette garce féconde en nous laissant penser que nous étions capables

    de nous l’approprier alors qu’en fait le monde ne vit à sa surface sa destinée instable

    qu’en attente de l’heure, de l’ultime seconde ou il ne sera plus qu’un festin misérable

    Je me demande bien si les grands dinosaures ont eu la prétention, tant de siècles avant nous

    d’être maitres sur terre, de se croire les plus forts jusqu’au jour ou celle-ci les extermina tous.

    Et je serais curieux dans quelque cent mille ans de voir les occupants de cette jolie planète

    étudier les fossiles…rassembler quelques dents… se perdre en conjectures et se creuser la tête

    sur la disparition de ce drôle d’habitant qui semblait adapté mieux que toutes les bêtes

    Celui-là ; ce probable évolué croira à l’immortalité de sa race supérieure,

    tandis qu’insatisfaite la terre préparera dans ses cellules internes un nouveau successeur.

    Qu’elle n’ait pas d’illusions. Elle n’est elle-même qu’une poussière infime perdue dans l’univers

    Qui trouvera tôt ou tard sa rotation ultime dans le ventre géant d’un trou noir et pervers.

     

     


     

     

    Les enfants de l’espoir

     

     

    Les plus vieux marchent là depuis quelques années.

    Dans des ventres féconds arrivent les suivants

    et dans les yeux des filles au regard étonné

    certains jours on devine les prochains arrivants.

     

    Ils auront à grandir sur la Terre, abimée

    par un siècle vengeur. La fin d’un millénaire

    qui a vu leurs aïeuls et leurs pères décimés

    par leurs propres erreurs, créatrices de misère.

     

    Leur mépris de la vie même quand elle est humaine,

    leur mépris d’un futur qu’ils ne connaîtront pas,

    pour quelques millions d’hommes a bien su rendre vaine

    la mise en garde de ceux qui craignaient les dégâts.

     

    Ils auront à gérer les mille conséquences

    que leurs auront légués leurs illustres ascendants                      

    qui à trop vouloir faire évoluer la science

    auront pollué la Terre, sali les océans.

     

    Alors ils grandiront les enfants de demain,

    et ils continueront à écrire l’histoire,

    mais auront-ils compris que du sang sur leurs mains

    n’a rien de nécessaire pour atteindre la victoire.

     

    Peut-être apprendront-ils à respecter la vie.

    En détruisant surtout les barrières imbéciles,

    de la langue déjà, des frontières aussi

    pour abolir enfin toute haine facile.

     

    Et ils fabriqueront les outils du bonheur

    que leurs pères savaient mais dont ils n’usaient pas,

    soit par manque de foi, soit parce qu'ils avaient peur

    ou peut-être plus grave, parce qu'ils n’en voulaient pas.

     

     


     

    Les étoiles.

     

    Elles naissent dans des cataclysmes gigantesques,

    Et nous les observons à des années lumières,

    Dans d’autres galaxies, dans des décors dantesques,

    Avec l’œil des voyeurs, pour elles si éphémères.

     

    Elles ont des couleurs qui changent avec l’âge.

    Elles sont bleues, ou blanches, ou jaunes, ou oranges.

    La notre c’est le soleil. Une étoile bien sage

    Qui deviendra pourtant une géante rouge.

     

     

     

     

     

     

    De l’Égypte au Mexique l’homme l’a déifié.

    Peut-être à juste titre puisque c’est en mourant

    Que les étoiles libèrent mais peut-on s’y fier

    Les atomes qui nous forment, selon quelques savants.

     

     

    C’est dans la nuit glacée du zéro absolu

    Que les géantes rouges deviendront naines blanches.

    Elles perdront leur clarté et nous ne verrons plus

    Malgré nos télescopes qu’un scintillement qui flanche.

     

     

    Je trouve un peu triste d’enlever leur mystère

    A toutes ces étoiles qui éclairent nos nuits.

    A force d’expliquer nous sommes trop terre à terre,

    Est-ce que la poésie réellement nous nuit ?

     


                                                                                                                                       

     

                                                    Les illuminés.

     

     

    Nous ne comprenons rien aux lumières des fous

    Qui éclairent leurs yeux fixés sur l’infini.

    Ils observent un monde qui nous est interdit

    Qui n’appartient qu’à eux et dont ils sont jaloux.

     

    Ils voyagent souvent au milieu des étoiles

    Évadent leurs esprits dans d’autres galaxies.

    Puis reviennent parmi nous, illuminés. Ravis.

    Parfois quand ils sont peintres ils nous laissent des toiles

     

    Si ils brisent du verre c’est pour faire des soleils,

    Éparpillés au sol en milliers de diamants,

    Qui se refléteront jusqu’à leur firmament

    Dans ce feu qu’ils ont mis et qui les émerveille

     

    Ils n’ont pas tout à fait les mêmes mots que nous

    Quand ils parlent aux nuages, aux arbres ou aux oisons

    Alors, persuadés qu’ils perdent la raison

    Nous appelons la science qui les met à genoux

     

    Ils seront les captifs de trop blanches prisons

    Ou des hommes les auront prives de tous leurs ciels

    Car ils auront jugé leur regard démentiel

    Avec la bonne conscience de ceux qui ont raison.

     

     


     

     

     

    Le prisonnier

     

     

     

    Quand certains soirs flotte un ennui

             Qui m’enveloppe lentement

                         Comme un otage dans la nuit

                                 Je m’abandonne tristement

               Alors un souvenir enfui

                                       De ma mémoire doucement

                                                 Se pose au bord de ma vie

                                                                   Furtif oiseau de firmament.

     

    Tel un reproche il me poursuit

                Et me harcèle et pourtant

                           Je ne peux me passer de lui

       Dernier témoin d’un moi vivant

             Au petit jour il est parti

                                       Je vais donc vivre en attendant

                                                        Des heures pleines de nostalgie

                                                             Et de regrets évidemment.

     

     

    Je sais, c’est moi qui suis parti

                 Est-ce une raison cependant

                           Pour renier ce qu’on s’est dit

                 Aux jours heureux de nos serments.

                       L’espoir est entré dans ma vie

                                             C’est tout ce que j’ai maintenant

                                                   Et puis les souvenirs aussi

                                                      Qui me visitent de temps en temps  

     

     

    J’espère que le jour maudit

                       Où je ne serai que l’absent

                           Ne hantera jamais mes nuits.

                                                          J’aimerais mieux mourir avant.

     

     

     


     

     

     

    Les révoltés

     

     

     

     

    Pour ébranler les édifices

    Ou se fabriquent les injustices,

    Face au pouvoir des militaires

    Des dictateurs et grands sur terre.

    Ils ont leurs mots les révoltés ;

    Si dérisoires en vérité.

    ………………………………

    Pour briser la loi de l’argent

    Pour combattre les dirigeants.

    Pour arrêter le nucléaire,

    Pour faire échec à la guerre .

    Ils ont leurs mots les révoltés ;

    Si dérisoires en vérité.

    ……………………………

     

    Pour dénoncer les marées noires .

    Accuser les voleurs notoires.

    Pour sauver les peuples affamés.

    Sortir de l’enfer les damnés.

    Ils ont leurs mots les révoltés ;

    Si dérisoires en vérité.

    ………………………………

    Pour dignement porter en terre

    Les morts de toutes les galères.

    Pour parler de fraternité

    A des enfants déshérités.

    Ils ont leurs mots les révoltés ;

    Bien dérisoires en vérité.

    …………………………

    Pour libérer les opprimés.

    Sauver des nations abimées.

    A des prisonniers dans le noir

    Apporter juste un peu d’espoir...

    Ils meurent souvent les révoltés ;

    D’un accident inexpliqué.

     

     

     


     

     

     

    La prison du peintre

     

     

    Explosions. Implosions dans sa tête fragile,

    La douleur qui parvient à user peu à peu.

    Malgré la solution de ses pinceaux agiles

    Il ne réussit pas à étouffer ce feu

    Qui tue son énergie, chaque jour, patiemment.

     

    Vincent n'accepte plus cette vision terrible

    De tableaux projetés en des gestes violents.

    Il meurt de cette vie des êtres invisibles.

     

    De fuites en errances... Il cherche un peu partout

    Ce rivage d’espoir où il va enterrer

    Ses douleurs, ses erreurs, ses hantises surtout

    Et peut-être trouver la paix tant espérée.

     

    Et c’est sous le soleil d’un midi éclatant

    De jaunes tournesols et de gris oliviers

    Qu’il est persuadé pendant un certain temps

    D’avoir touché au but... d’être enfin arrivé.

    La rémission pourtant est de courte durée.

    Le peintre est exalté mais son mal plus profond

    Qu’il n’a jamais été . Son cerveau torturé

    Dans un trait de folie préfère l’abandon.

     

    Vincent décide alors qu’il va enfin partir

    Sur l’envers du miroir, chercher d’autres couleurs

    Pour peindre dans le noir des éclats de fou-rire,

    Serein d’avoir accès à d'autres profondeurs.

     

     

     

     

     


     

     

     

    Les filles cassées

     

     

     

    Après être rentrée comme chaque matin

    Elle va essayer d’oublier jusqu’au soir

    Dans un sommeil peuple de rêves incertains

    Son quotidien sordide d’asphalte et de trottoirs.

     

    De l’Europe de l’est, elle est venue un jour

    Avec ses deux amies et des tonnes d’espoir.

    Sur le quai de la gare elle revoit toujours

    Ses parents attristés se fondre dans le noir.

     

    Ses amies sont parties depuis déjà longtemps,

    La première disparue sans une explication.

    Les hasards de la rue lui ayant sûrement

    Fait miroiter la chance d’une autre déviation.

     

     

     

    Mais pour l’autre ; la plus proche, elle revoit encore

    Dans ses yeux agrandis par un flash éphémère

    Venant de l’intérieur le voile de la mort

    Ternissant son regard en ôtant sa lumière.

     

     

     

    Elle se sait fragile malgré les apparences

    Certains jours elle voit sa révolte qui s’épuise.

    Elle a peur de rester seule avec sa souffrance

    Et le lien qui l’accroche à la vie s’amenuise.

     

     

     

    Alors elle rêve parfois d’un pays sans trottoirs

    Où l’herbe pousserait à travers le goudron

    Où elle se coucherait toute seule le soir

                                                                             En attendant l’amour et les joies qui suivront.

     

     

     

     


     

     

     

     

     

    La corrida.

    _________

    Tu es venu le voir un jour avant sa mort. Depuis toutes ces années que tu es le vainqueur,

    un seul doute t’obsède, « ton toro sera-t-il en puissance et courage,

    capable de grandir ton image. Matador. D’auréoler ta gloire ».

    Tu veux sous les vivats, les olé, les bravos,

    sentir vibrer la foule ! Tout le reste est si vain…

    Et la vie d’un toro pèse si peu de choses

    Face à son vainqueur gonflé de vanité !

    __________________

    Ta technique est au point et avec ta cuadrilla,envols et tourbillons, piques et banderilles ;

    six cents kilos de rage s’écraseront au sol !

    Puis la foule hurlera ! Debout sur les gradins ! 

    Et elle réclamera du toro déjà mort

    Qu’il abandonne encore ses oreilles et sa queue !

    Comme si son massacre n’était pas suffisant. Comme si il fallait l’humilier un peu plus.

    Toréro d’un côté, admirateurs de l’autre,

    En tout plusieurs milliers et pas un pour se dire :

    « Mais qu’est-ce que je fais là ? D’où me vient cette joie ? de voir quelques pantins, barbares d’un autre temps,

    saouls de trancher à vif un toro innocent… »

    En tout plusieurs milliers et pas un pour se dire :

    « Quels drôles de bas instincts peuvent m’entrainer ici sur ce disque doré pour voir danser la mort »…….

    ________________

     

     


     

     

     

     

    TORO

     

    Des terres d’Andalousie où tu vivais serein
    depuis quatre ou cinq ans tes souvenirs affluent.
    En parfums de prairies, en ombres d’oliviers,
    en sons tous familiers, et le regard portait
    des montagnes à la mer et en songes plus loin…


    Depuis une semaine le corral et ses murs !
    Et cinq autres toros sont tout ton univers.
    Tu regardes ta vie mais tes yeux sont éteints,
    un instinct de guerrier remue au fond de toi
    et gronde et s’amplifie quand des hommes sont là.
    Ils viennent te regarder, tu ne sais pas pourquoi
    mais tu sens bien qu’ils sont la cause de ton malheur.
    Et tu attends ton heure… si l’un d’eux se découvre…


    Si tu pouvais savoir l’implacable machine
    qui depuis quelques jours s’est mise à fonctionner.


    Du toril de nuit noire un carré de lumière !
    Cet éclat de soleil que tu attendais tant !
    Quelques pas à franchir et c’est la liberté !
    Mais… un rond de poussière, jaune et rouge sanglant.
    Une foule en délire : vacarme assourdissant
    et du bois se détachent, virevoltants tissus,
    des capes roses et jaunes dans la lumière crue.
    Tu ne peux plus t’enfuir, le piège est refermé
    et sans rien y comprendre il te reste à lutter.


    Le picador saura sur son cheval aveugle
    savamment découper les muscles de ton dos,
    et déchirant ton cou créer une fontaine
    qui noiera tes épaules, tes pattes, tes sabots.


    Infirme désormais, tes armes inutiles,
    le mufle au ras du sol, tu sentiras le sable
    et le verras rougir de ta vie qui s’en va.
    Il boira tout ton sang en larges tâches rouges.
    Peut-être à ce moment sauras-tu que la mort
    s’invite dans ta vie, prête à la remplacer.


    Ces danseurs de lumière qui tournent autour de toi
    sont là pour la servir. Tes yeux vont se fermer…
                                                   Oui, ils vont se fermer loin de l’Andalousie…
                                                                                           Des ombres d’oliviers… des parfums de prairie…
                                                                                                         Triste toro jouet de ce jeu de massacre
                                                                                                                                              que des hommes ont voulu pour leur satisfaction.

     

     


     

    A Édouard Élias, photographe, prisonnier.

    A tous les autres ...

     

    Une ville en noir et blanc.

     

     

    Étrangement.

    La vie s'écoule encore ici, en chemins fracassés.

    Elle glisse prudente entre peur et douleur, fait confiance au hasard.

    Elle emprunte des ombres souvent tachées de sang qui se tiennent aux murs,

    troués, tagués, d'où sortent des fumées : Cicatrices de flammes...

    Elle emprunte des corps, d'où sortent des prières rythmées par le chant des kalachs.

    La vie ne finit pas, malgré les armes et les cris elle continue son œuvre :

    serpent d'entrailles qui se trainent.

     

    La peur suinte des façades blessées derrière lesquelles se terrent quelques restes humains secoués de tremblements.

    Elle envahit la ville, s'accroche aux pas pressés qui cherchent un abri.

    Elle aime les regards quand ils sont un peu fous,

    mais les quitte aussitôt qu'ils s'ombrent sous la mort.

    Elle se fait compagne de la vie tout naturellement.

    Alliance torturée de corps fontaines rouges, et d'autres un peu trop blancs.

     

    Édouard était parti pour nous montrer tout ça !

    Au milieu des guerriers il prenait des photos.

    Des photos noir et blanc.

    Çà fait déjà longtemps qu'il manque à son regard l'étincelle d'enfance

    qu'il a perdue là-bas...

     

    Il reviendra un jour.

     

    En attendant ; un oiseau blanc s'éveille ; passe sans s'arrêter...

    Les petits garçons, silencieux  ne jouent pas à la guerre...

     

     


     

    Mes feuilles d’automne

     

     

    Je les semais déjà depuis un certain temps sans m’en apercevoir.

    Elles tombaient sans bruit, de l’été au printemps, selon leur bon vouloir

    et parsemaient le sol sur lequel j'avançais, de taches colorées.

    Pensif, près d'un ruisseau, je regardais penché l’eau qui les emportait.

     

     

    Ces feuilles griffonnées racontent des histoires,

    des drames ou des amours, des messages secrets,

    des bribes de mémoire, des contes de toujours.

    Je les vois raturées, glissant au fil de l’eau ;

    Quels étranges bagages que je portais en moi ;

    véritable fardeau depuis le plus jeune âge.

     

    Mais saurai-je un jour pourquoi elles me libèrent en tombant maintenant ?

    Après m’avoir vidé de mes joies, mes colères et souvent mes tourments.

    Enfin il y aura celles qui me soulageront en s’abandonnant là,

    comme un mal arraché elles ne rongeront que les traces de mes pas.

     

    Je les regarderai par-dessus mon épaule, un peu vide, guéri.

    Et je continuerai à semer comme un rôle que j’aurais bien appris.

    Et puis viendra le jour où je n’aurai plus rien à laisser derrière moi.

    Quand ma source tarie aura rompu le lien pour continuer ma voie.

    S’installera l’attente… l’insondable mystère… L’ultime liberté…

     

    Et mes feuilles d’automne pourriront en hiver...

     

    Inutile de lutter...

     

     

     

     


     

     

    Léonard.

     

    Léonard aurait-il un jour imaginé,

    imbéciles humains, que nous disparaîtrions ?

    Et qu’il ne resterait pouvant nous succéder

    que quelques araignées et que quelques scorpions,

    nouveaux maîtres sur terre après l’humanité,

    eux qui résistent bien à nos irradiations.

     

    Ils attendent que vienne sans animosité

    L’ère inéluctable de leur domination.

    Regardez ces insectes qui ne semblent habités

    par nul désir de gloire, ni rêves de succession.

    Ils rampent, tristes et mornes, paraissant harassés,

    et les traces qu’ils laissent n’ont pas d’autre ambition

    que de les ramener pas à pas, résignés,

    vers un trou minuscule qui leur sert de maison.

    Cette vie misérable qu’ils doivent supporter

    nous parait dérisoire quand nous la détruisons

    et sous notre talon comment imaginer

    qu’ils soient les successeurs de nos générations.

     

     

    Et si leur mégalo n’avait pas aveuglés

    Dans leurs rêves de gloire les hommes par millions

    Ils seraient sûrement un peu préoccupés

    Par leur propre destin sans doute en perdition.  

     

     


     

     

     

     


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